Franck Laffaille - Université de Paris XIII

2022

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

 

 

FRANCE

By Franck Laffaille

Faculté de droit de Villetaneuse (IDPS)

Université Sorbonne-Paris-Nord

 

Name of the Act/s

Conseil constitutionnel

Décision n°2022-1003 QPC

8 juillet 2022

Association Groupe d'information et d'action sur les questions procréatives et sexuelles [Accès à l'assistance médicale à la procréation]

Conformité

Comment 

Le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions législatives déférées (cf. la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique) – ouvrant l’accès à l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples (un homme et une femme, deux femmes) et aux femmes non mariées – sont conformes à la Constitution. C’est par la négative qu’il convient de réfléchir : sont privés du bénéfice de la loi les hommes seuls ou en couple avec un homme. Il s’ensuit que ne peuvent recourir à l’AMP les femmes qui – après une modification de la mention relative à leur sexe – ont conservé leurs capacités gestationnelles.

Selon l’association requérante, la loi – excluant les femmes en capacité de mener une grossesse après changement de la mention de leur sexe - institue une différence de traitement injustifiée. Cette différence de traitement serait contraire aux principes d'égalité devant la loi et d'égalité entre les hommes et les femmes. Le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence. En outre, il serait porté atteinte à la liberté personnelle et au droit de mener une vie familiale normale : les hommes transgenres devraient renoncer à modifier la mention de leur sexe à l'état civil pour conserver la possibilité d'accéder à l’AMP.

Le Conseil rappelle tout d’abord qu’il est « loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ». Une condition : que dans l'exercice de ce pouvoir, le législateur ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. Aussitôt rappelée cette formule classique, le juge en énonce une autre – classique également – qui ne laisse présager rien de bon pour les saisissants : « L'article 61-1 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité des dispositions législatives soumises à son examen aux droits et libertés que la Constitution garantit ».

Quid de la loi déférée au regard du principe d’égalité (article 6 de la DDHC de 1789) ? Là encore, rappel d’une jurisprudence classique il y a : « Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ».

Qu’en est-il dans le cas présent ? Le Conseil se fonde sur les travaux préparatoires de la loi. On avoue n’apprécier que modérément une telle logique herméneutique car elle repose sur un présupposé erroné : que le législateur possède une volonté unique que le juge serait capable de décerner. Cette quête d’unité est rassurante ; elle est méthodologiquement naïve et peu pertinente. Ici, le juge estime – au regard des travaux préparatoires – que le législateur a voulu permettre l’égal accès des femmes à l’AMP « sans distinction liée à leur statut matrimonial ou à leur orientation sexuelle ». Cependant, la différence de situation entre les hommes et les femmes (au regard des règles de l'état civil) est de nature à justifier une différence de traitement, en rapport avec l'objet de la loi. Il ne manquait plus – pour acter la régularité de la loi – que le Conseil ajoute qu’il ne lui appartient pas de de « substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, d'une telle différence de situation ». Il n’y a pas méconnaissance du principe d'égalité, tout comme il n’y a pas méconnaissance du droit de mener une vie familiale normale ou encore de la liberté personnelle.

Cette décision est assez révélatrice du self-restraint du Conseil dès lors qu’il est confronté à des questions éthiques.

Available Text

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046028341

2022

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord 

Name of the Act/s

Conseil constitutionnel

Décision n° 2021-834 DC du 20 janvier 2022

Loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure

Non conformité partielle - réserve

2022

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord 

Name of the Act/s

Loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure.

Comment 

La loi comporte deux volets: le premier est relatif à la responsabilité pénale en cas de prise de produits psychoactifs ... le second relatif à la sécurité intérieure.

La loi modifie le code pénal s’agissant de la responsabilité pénale en cas de prise de produits psychoactifs.

Avant cette réforme, une personne n'était pas pénalement responsable si elle « était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ». La loi ne faisait pas référence à l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement. Désormais, est exclue toute irresponsabilité pénale en cas d’abolition temporaire du discernement si celui-ci provient de la consommation - volontaire et dans un temps très voisin de l'action - de substances psychoactives, et ce avec l’objectif de réaliser un crime ou un délit. Dans l’hypothèse d’une divergence entre experts s’agissant de l’abolition et l’altération du discernement, le juge (tribunal correctionnel ou cour d'assises) a l’obligation de statuer (audience à huis clos) sur la seule question de l'irresponsabilité. Dès lors qu’un prévenu n’est pas déclaré pénalement irresponsable, l’affaire est jugée lors d'une audience ultérieure. Cette loi relative à la responsabilité pénale en cas de prise de produits psychoactifs possède une origine précise : « l’affaire Sarah Halimi », du nom de cette victime d’un meurtre antisémite en 2017. La chambre criminelle de la Cour de cassation avait alors conclu à l’irresponsabilité pénale du meurtrier ; ce dernier est réputé atteint d’un trouble mental provoqué par une « bouffée délirante aiguë » à la suite de la consommation habituelle de cannabis. La loi de 2022 crée deux délits d'intoxication volontaire ; l’objectif est de punir toute personne s’étant intoxiquée délibérément avec des produits psychoactifs engendrant la perte de tout discernement, au point de commettre un meurtre, des violences, viols et tortures. Désormais, une telle personne pourra encourir des peines de prison allant de 2 à 10 ans (15 ans en cas de récidive dans les mêmes circonstances). Enfin, la loi étend la circonstance aggravante de consommation de drogue ou d’alcool à différentes infractions : meurtres, tortures, actes de barbarie et violences mortelles.

Secondement, la loi adopte des mesures relatives à la sécurité.

Il est institué un délit spécifique de violences volontaires contre les agents chargés de la sécurité intérieure (policiers nationaux et municipaux, gendarmes, surveillants de prison, militaires de l’opération Sentinelle) ; à noter que sont également protégés les membres de leur famille. Des peines pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison sont adoptées ; toute réduction de peine est exclue. La loi adopte diverses dispositions relatives à l’usage des caméras et des drones par les forces de l’ordre.

Sont visés :

les gardes à vue et retenues douanières (utilisation de la vidéo seulement en cas de risque d’évasion ou de danger, interdiction de dispositif biométrique ou de captation du son...),

les caméras situées dans les voitures des policiers, gendarmes, et douaniers,

les drones utilisés par les policiers, gendarmes et militaires de l’opération Sentinelle. Leur usage renvoie à des « finalités de police administrative » (prévention des atteintes à la sécurité des personnes, actes de terrorisme, sécurité des rassemblements sur la voie publique en cas de risque de « troubles graves à l’ordre public ». L’accord du préfet est impératif. L'usage des drones est encore possible pour « des finalités judiciaires » (enquête ou instruction relative à des crimes et délits, personne disparue ou en fuite) ... et en matière de douanes (cf. les missions de prévention des trafics transfrontaliers).

Autres mesures posées par la loi : un prévenu présenté devant une juridiction pénale incompétente (à raison d’une erreur sur sa majorité ou sa minorité) peut être gardé à la disposition de la justice (le temps de le présenter devant la juridiction compétente). En cas de refus, par une personne, de donner son identité lors d’une enquête, il est désormais possible de recueillir ses empreintes digitales sans son consentement (encore faut-il l’accord du parquet).

Le Conseil constitutionnel censure partiellement la loi et émet des réserves d’interprétation dans sa décision du 20 janvier 2022 n° 2021-834 DC (voir infra).

Available Text

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045067923.

2022

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord 

Name of the Act/s

Loi n° 2022-171 du 14 février 2022 tendant à abroger des lois obsolètes pour une meilleure lisibilité du droit.

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045167534.

Date of entry into force of original text

Date of Text (Adopted)

Type of text

(name in English / name in the official language)

If federal State

If Regional State

Enacted by

Reference to the Constitution (art)

Subject area

If the act implements a source of EU Law: cite the relevant EU legal source

Comment 

La loi du 14 février 2022 abroge certaines lois réputées obsolètes ; l’objectif du législateur est « une meilleure lisibilité du droit ». 115 lois promulguées entre 1941 et 1980 sont abrogées. Parmi celles-ci, notons :

une loi relative au GPRP :

loi du 24 novembre 1945 relative aux attributions des ministres du Gouvernement provisoire de la République et à l’organisation des ministères,

diverses lois adoptées sous la IVème République :

la loi du 1er octobre 1946 fixant à 23 ans l’âge de l’éligibilité aux assemblées ou collèges électoraux élus au suffrage universel et direct,

la loi du 4 mars 1948 portant fixation des circonscriptions électorales pour la désignation des membres de l’assemblée algérienne,

la loi du 18 mars 1950 concernant l’appel en 1950 des jeunes gens sous les drapeaux,

la loi du 19 juillet 1954 modifiant l’article 8 de la loi du 23 septembre 1948 relative à l’élection des conseillers de la République,

la loi du 4 janvier 1955 relative aux marques de fabrique et de commerce sous séquestre en France comme biens ennemis,

la loi du 23 juillet 1957 accordant des congés non rémunérés aux travailleurs en vue de favoriser l’éducation ouvrière

            diverses lois adoptées sous la Vème République :

la loi du 16 juin 1966 complétant l’article 401 du code pénal en matière de filouterie de carburants et de lubrifiants,

la loi du 31 juillet 1968 relative aux forclusions encourues du fait des événements de mai et juin 1968,

la loi du 9 juillet 1970 relative à la mise à parité des pensions des déportés politiques et des déportés résistants,

la loi du 4 juillet 1975 tendant à la généralisation de la sécurité sociale,

la loi du 16 juillet 1976 portant institution d’un repos compensateur en matière d’heures supplémentaires de travail,

la loi du 17 juillet 1980 instituant une assurance veuvage en faveur des conjoints survivants ayant ou ayant eu des charges de famille.

Secondary sources/ doctrinal works (if any)

 

Available Text

 

2022

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord 

Name of the Act/s

Projet de loi relatif à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites ((MICB2124079L).

Texte adopté par le Parlement. En attente de promulgation par le président de la République.

https://www.legifrance.gouv.fr/dossierlegislatif/JORFDOLE000044287226/.

Date of entry into force of original text

Texte présenté au Conseil des ministres du 3 novembre 2021 par la ministre de la culture. Adopté, en première lecture, avec modifications, par l'Assemblée nationale le 25 janvier 2022. Adoption, le 15 février 2022, par le Sénat en première lecture (sans modification). Engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement.

Date of Text (Adopted)

Type of text

(name in English / name in the official language)

If federal State

If Regional State

Enacted by

Reference to the Constitution (art)

Subject area

If the act implements a source of EU Law: cite the relevant EU legal source

Comment 

Le projet de loi a pour finalité de restituer des tableaux, dessins ou sculptures se trouvant actuellement dans des collections publiques. Ces œuvres ont été spoliées avant et pendant la seconde guerre mondiale à des personnes juives. Ce texte est d’importance : il s’agit de la première loi permettant de restituer aux ayants droit des œuvres appartenant aux collections publiques. Il est porté louable dérogation au principe d'inaliénabilité des biens appartenant aux collections des musées de France. Sont visés: un tableau de Klimt (« Rosiers sous les arbres », musée d’Orsay), un tableau d’Utrillo intitulé (« Carrefour à Sannois », musée Utrillo-Valadon de Sannois), des dessins de Forain, Guys, Monnier, Roqueplan, une cire de Mène (collection d’Armand Dorville), un tableau de Chagall (« Le Père », Musée national d’art moderne). Quant aux musées concernés, ils ont obligation – dans un délai d’un an – de restituer les œuvres en question. Le texte est aussi salutaire que tardif ; il aura fallu nombre de décennies pour que la République restitue des biens qui ne lui appartenaient pas, spoliés pendant la guerre. Le premier pas a été effectué en 1995 par Chirac (discours sur la responsabilité de l’Etat dans la déportation des Juifs de France). En décembre 1999 (décret n°99-778), avait été instituée une Commission l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation.

Secondary sources/ doctrinal works (if any)

 

Available Text

 

Osservatorio sulle fonti

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