France

Conseil constitutionnel (3/2019)

1. 

2019

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord

Name of the Act/s

Conseil constitutionnel

Décision n°2019-791 DC du 7 novembre 2019

Loi relative à l'énergie et au climat

Conformité, réserve

Comment

La loi – relative à l'énergie et au climat - a trait à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh) ; la loi est déclarée conforme, sous réserve d'interprétation. EDF peut être obligée de fournir chaque année à la vente aux autres fournisseurs d'électricité un volume d'électricité nucléaire historique, cela à un prix déterminé par arrêté. Selon les sénateurs saisissants, la liberté d'entreprendre était méconnue. Le CC rappelle que le législateur peut apporter des restrictions à la liberté d'entreprendre (article 4 de la DDHC de 1789) au nom d'exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général. Encore faut-il que ne survienne pas une atteinte jugée disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi. Il s'agit là d'une jurisprudence classique. Quand bien même la loi porte atteinte à la liberté d'entreprendre, elle franchit avec succès le test de constitutionnalité : elle apparaît justifiée par la notion d'intérêt général. Si EDF – qui dispose d'un monopole de production de l'électricité nucléaire – doit offrit à la vente aux autres fournisseurs un volume d'électricité nucléaire historique à un prix déterminé... cela s'inscrit dans le cadre de l'ouverture à la concurrence du marché de fourniture d'électricité. Sans une telle loi – estime le CC – les autres fournisseurs auraient dû acquérir une électricité plus chère, faute de pouvoir accéder à un volume d'énergie suffisant ; cela se serait traduit par un hausse des prix de l'électricité pour le consommateur final. La loi entend réguler un « fonctionnement concurrentiel » du marché de l'électricité, garantir une certaine stabilité des prix ; voici pourquoi elle est réputée poursuivre un objectif d'intérêt général. Des garanties ont été instituées par le législateur aux fins de limiter l'atteinte à la liberté d'entreprendre subie par EDF. En particulier, la quantité d'électricité qu'EDF doit céder connaît un plafond annuel ; une telle limitation, est jugée proportionnée aux objectifs de développement de la concurrence sur le marché visé. Le CC émet cependant une réserve d'interprétation : pour ne pas porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre, les ministres compétents doivent arrêter un prix en tenant compte des conditions économiques de production d'électricité par les centrales nucléaires.

Available Text

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019791DC.htm

2. 

2019

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord

Name of the Act/s

Décision n°2019-809 QPC du 11 octobre 2019

Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres (Droits d'inscription pour l'accès aux établissements publics d'enseignement supérieur)

Conformité

Comment

Quid de l'exigence de gratuité de l'enseignement supérieur public ? Ardue était la question (QPC) posée au CC. Il devait en effet juger de la constitutionnalité de la loi n°51-598 de 1951. Selon cette dernière, les taux et modalités de perception des droits d'inscription, de scolarité, d'examen, de concours et de diplômes dans les établissements de l'Etat peuvent être fixés par voie d'arrêté. Selon les associations requérantes, de telles dispositions méconnaissent le 13ème alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 (qui fait partie du Bloc de constitutionnalité). Le principe de gratuité de l'enseignement public – découlant de telles dispositions – empêcherait la perception de droits d'inscription en matière d'accès à l'enseignement supérieur. Si l'exigence constitutionnelle de gratuité s'applique à l'enseignement public supérieur, rappelle le CC, cela ne fait pas obstacle à ce que soient perçus des droits d'inscription modiques. Encore faut-il qu'il soit tenu compte des capacités financières des étudiants. Pour le CC, les dispositions déférées se limitent à donner compétence au pouvoir réglementaire pour fixer les montants annuels des droits perçus par les établissements publics d'enseignement supérieur. Une impérative exigence prévaut : que le principe d'égal accès à l'instruction ne s'en trouve pas violé. Cette dernière formule est aussi louable que par trop générique et indéterminée : à partir de quel seuil y a-t-il violation du principe d'égal accès à l'instruction ? Il reviendra au juge ordinaire de le dire. Cette QPC vient rappeler que la question des droits d'inscription à l'université pose un double problème : social et académique. Social : si les droits d'inscription sont élevés, le principe d'égal accès à l'instruction n'est pas respecté. Académique : si les droits d'inscription sont faibles, les universités sont pauvres puisque l'Etat les dote de ressources insuffisantes. Quid de l'autonomie universitaire – si facilement et hypocritement sacralisée – et de la qualité du travail universitaire sans une réelle et substantielle autonomie financière ?

Available Text

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019809QPC.htm

3. 

2019

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord

Name of the Act/s

Décision n° 2019-808 QPC du 11 octobre 2019

Société Total raffinage France [Soumission des biocarburants à base d'huile de palme à la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants]

Conformité

Comment

La loi déférée (n°2018-1317) exclut l'huile de palme du régime fiscal favorable prévu pour les biocarburants. Cette différence de traitement est-elle inconstitutionnelle ? Non, selon le CC. La loi vise à inciter les entreprises (qui produisent ou importent des carburants) à incorporer une quantité minimale de biocarburants ; plus la quantité de biocarburants est élevée, plus le montant de la taxe instituée diminue. Cependant, les biocarburants issus de l'huile de palme sont exclus, sans qu'il soit possible de démontrer qu'une telle huile a été produite dans des conditions respectueuse de l'environnement. Selon le requérant, une telle exclusion – de principe – emporte une différence de traitement injustifiée, donc inconstitutionnelle, entre les carburants à base d'huile de palme et ceux issus d'autres plantes oléagineuses. En vertu de l'article 13 de la DDHC de 1789 et de l'article 34 de la Constitution de 1958, il appartient au législateur – rappelle le CC – de déterminer les règles relatives aux facultés contributives des contribuables, à l'aune des caractéristiques intrinsèques de chaque impôt. Le principe au centre de cette QPC est naturellement le principe d'égalité : pour que ce dernier soit respecté, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels au regard des objectifs fixés. Encore faut-il que n'advienne pas une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques, rupture qui – si elle survenait – entraînerait la censure de la norme déférée. Quel est le but du législateur lorsqu'il institue cette taxe incitative ? Lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Pour atteindre un tel objectif, le législateur tente de réduire les émissions directes et les émissions indirectes. Or, l'huile de palme possède une particularité : sa production implique une importante déforestation et un substantiel assèchement des tourbières. Au regard de cette spécificité, il n'apparaît pas injustifié de lui octroyer un régime fiscal différent, moins favorable. Il existe un objectif d'intérêt général de l'environnement que le législateur s'efforce de poursuivre ; la taxe incitative instituée – moins favorable fiscalement pour les producteurs d'huile de palme – s'inscrit dans le cadre de cet objectif. Le CC insiste sur un point : l'état des connaissances scientifiques actuelles. Le régime fiscal différencié institué par le législateur vaut en l'état des connaissances scientifiques. Les critères retenus par le législateur sont jugés objectifs et rationnels au regard du but poursuivi en l'état des connaissances scientifiques.

Available Text

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019808QPC.htm

4. 

2019

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord

Name of the Act/s

Décision n° 2019-804 QPC du 27 septembre 2019

Association française des entreprises privées [Dénonciation obligatoire au procureur de la République de certains faits de fraude fiscale]

Conformité

Comment

La QPC dont le CC est saisi vise l'article L. 228 du livre des procédures fiscales (poursuite pénale des faits les plus graves en matière de fraude fiscale). En vertu des dispositions déférées, l'administration fiscale doit dénoncer au procureur de la République les faits par elle examinés dans le cadre de son action de contrôle. Cette dénonciation doit advenir en présence de pénalités fiscales portant sur des droits d'un certain montant. Dans les autres configurations, le dépôt d'une plainte par l'administration fiscale ne peut survenir que sur avis conforme de la commission des infractions fiscales. Selon la requérante – une association – de telles dispositions législatives instituent des différences de traitement contraires à la Constitution. La distinction établie par la loi – obligation de dénoncer certains contribuables auprès du procureur de la République, non obligation de dénoncer certains contribuables auprès du procureur de la République – devrait être frappée d'inconstitutionnalité. Faisant lecture de l'article 6 et de l'article 16 de la DDHC de 1789, de l'article 34 de la Constitution de 1958, le CC rappelle la compétence du législateur : il lui revient de fixer les règles de la procédure pénale, d'édicter des règles de procédure différentes au regard de la nature des faits, de spécifier les situations dans lesquelles de telles règles reçoivent application, de préciser quelles personnes sont visées. Encore faut-il que les différences ainsi instituées par le législateur n'emportent pas de distinctions non justifiées, encore faut-il que des garanties égales soient assurées à l'ensemble des justiciables. Quel est l'objectif du législateur lorsqu'il édicte les dispositions déférées? Celles-ci rendent obligatoire la saisine du procureur de la République par l'administration en présence de faits de fraude fiscale les plus graves, faits de nature à générer des poursuites pénales. Quid du critère de dénonciation obligatoire ? Il y a obligation de saisir le procureur de la République quand les droits éludés sont supérieurs à 100000 euros et qu'est prévue au moins l'une des pénalités suivantes : abus de droit, opposition à contrôle fiscal, activité occulte mise à jour à la suite d'une non déclaration fiscale, manœuvres frauduleuses dans le cadre d'une déclaration insuffisante, non déclaration d'avoirs hors de France... Les critères retenus par le législateur sont regardés par le CC objectifs et rationnels, en lien avec le but recherché. A l'aune d'un tel constat, la différence de traitement instituée n'est pas synonyme de discrimination injustifiée entre les contribuables.  

Available Text

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019804QPC.htm

5. 

 

2019

Osservatorio sulle fonti / Observatory on Sources of Law

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Section: Sources of Law in the EU member States

FRANCE

By Franck Laffaille, Université de Paris XIII, IDPS, Sorbonne/Paris/Nord

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Décision n° 2019-802 QPC du 20 septembre 2019

M. Abdelnour B. [Utilisation de la visioconférence sans accord du détenu dans le cadre d'audiences relatives au contentieux de la détention provisoire]

Non conformité totale

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019802QPC.htm

Comment

Saisi d'une QPC portant sur l'article 706-71 du code de procédure pénale, le CC censure les dispositions déférées : il est contraire aux droits de la défense qu'une personne – placée en détention provisoire – ne puisse pas, pendant une année, comparaître physiquement devant le juge. En vertu des dispositions déférées, un détenu ne peut pas s'opposer à l'utilisation des moyens de télécommunication audiovisuelle lorsqu'il opère une demande de mise en liberté. Selon les requérants, le recours à la vidéoconférence ne comporte pas de garanties suffisantes au regard du principe des droits de la défense. L'enjeu n'est pas de peu : une demande de mise en liberté. Certes, relève le CC, l'utilisation de la vidéoconférence vise à diminuer les « extractions judiciaires » (sortie de prison pour aller voir le juge), coûteuses et compliquées à gérer. Certes, le juge peut décider de ne pas recourir à la vidéoconférence et demander la comparution physique du détenu. Certes, les conditions dans lesquelles se déroule la vidéoconférence doivent garantir les droits des intéressés, en premier lieu leur droit de présenter des observations. Certes, le détenu peut s'opposer à l'utilisation de la vidéoconférence : quand il est statué sur son placement en détention provisoire, quand il est statué sur la prolongation de sa détention provisoire. Cependant, s'agissant de la 1ère prolongation de la détention provisoire, le CC opère le constat suivant : il est possible qu'elle ne survienne qu'à l'issue d'une année entière. Un détenu peut être privé – pendant 1 an – du droit de comparaître physiquement devant le juge de la détention. Or, le fait qu'un détenu puisse se présenter physiquement devant son juge s'avère une garantie essentielle à l'aune des droits de la défense. Les dispositions déférées sont ainsi réputées portées une atteinte excessive aux droits de la défense. Contrariété avec la Constitution il y a. Ultime point, d'importance : les dispositions censurées ne sont plus en vigueur à la date où le CC rend sa décision. Question : est-il possible de remettre en cause les mesures jadis prises sur les fondements de ces dispositions ? Non répond le juge. Si les mesures prises sur de tels fondements étaient remises en cause, il serait porté atteinte aux objectifs de valeur constitutionnelle (OVC) que sont : la sauvegarde de l'ordre public, la recherche des auteurs d'infractions. Une telle remise en cause aurait alors des conséquences manifestement excessives selon le CC. Nonobstant la censure opérée, les mesures en question ne peuvent pas être contestées sur le fondement de l'inconstitutionnalité constatée.

Available Text

https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019802QPC.htm

 

 

 

Osservatorio sulle fonti

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